Apprendre à déguster (3): Mettre les atouts de son côté

Apprendre à déguster (3): Mettre les atouts de son côté…

Comment bien préparer sa dégustation?

Que les deux premiers articles de cette série aient éveillé votre intérêt (cfr. rubrique du blog « Le vin pour tous ») ou que vous nous rejoigniez pour ce troisième volet, soyez les bienvenus pour partager notre voyage pédagogique et sensoriel dans l’univers qui passionne les dégustateurs, amateurs ou professionnels!

Nous entrons cette fois dans le vif du sujet. A de trop nombreuses reprises, j’ai eu l’occasion d’assister à des séances de dégustation qui se révélaient décevantes aux yeux (et papilles) des participants. Il en va parfois de la diversité des attentes et motivations du groupe ou du manque d’intérêt des vins présentés, mais le plus souvent, les motifs de frustration se trouvent ailleurs.

Essayons de comprendre. Certaines règles de base sont à respecter, afin de bénéficier des meilleures chances de réussite. Les appliquer, c’est déjà faire preuve de sérieux et de motivation, le caractère convivial de l’exercice ne pouvant occulter la rigueur des modalités d’organisation.

Définissons donc les conditions nécessaires pour assurer un environnement favorable à toute dégustation organisée entre amateurs, dont l’objectif dépasserait un simple échange d’idées.

Voici quelques réponses concrètes aux questions les plus courantes qui me sont régulièrement posées:

Où déguster?

La pièce que vous choisirez doit être claire, bénéficiant de préférence d’une lumière naturelle. À défaut de celle-ci, il convient d’utiliser un éclairage le plus « blanc » possible, qui modifie peu les couleurs du vin. Les lumières « chaudes » sont donc à éviter. Si le local n’est pas suffisamment clair, une lampe de type halogène est appropriée. Rien ne remplacera toutefois les atouts du blafard « néon », particulièrement neutre dans son influence. Pour ce type d’exercice, évitez donc les endroits pittoresques mais peu favorables tels que caves privées, pièces aux lumières chaleureuses et tamisées, caveaux aménagés sans lumière naturelle, chais de vignerons…

 

 

 

 

Un milieu aromatiquement neutre ?

Cela va de soi… Toute odeur ambiante étrangère au vin (tabac, parfum, cuisson,…) réduit de manière significative l’intérêt de la dégustation mais surtout la qualité des enseignements qu’on peut en tirer.

Aux acharné(e)s du flacon (de parfum), rappelons qu’il est déconseillé de s’asperger de son eau de toilette favorite avant toute dégustation. Les senteurs souvent entêtantes du parfum font partie des parasites les plus redoutés, pour une raison simple: les deux produits explorent régulièrement des familles d’arômes similaires ou très proches. Entre le bouquet du vin et celui de la voisine, nos perceptions courent un risque de confusion, voire d’égarement…

Quand déguster?

Une règle simple est à respecter. Il est communément admis que pour bénéficier de sens aiguisés, les heures qui précédent les repas sont les meilleures (10h30-12h30 et 18h-20h). La fin de matinée ou l’avant-soirée sont donc à privilégier. Il est en effet facile d’imaginer que l’approche d’un dîner met notre aptitude sensorielle en alerte. Les perceptions les plus subtiles seront alors à notre portée!

Par ailleurs, comme rappelé dans les précédents articles, la dégustation entre amateurs représente avant tout un moment de partage. Si vous la pratiquez avant le repas, cela vous permettra de comparer les impressions gustatives au cours de celui-ci, la recherche d’alliance avec les mets faisant intégralement partie du processus global de votre quête épicurienne.

Alors, le vin pour le vin, c’est déjà très tentant… Mais le vin au service d’un plat (et pourquoi pas l’inverse?), c’est souvent irrésistible!

Lorsqu’on boit du vin en mangeant, il s’agit la plupart du temps d’actes distincts et successifs. Avez-vous déjà expérimenté l’approche globale, qui met en présence, simultanément dans la bouche, le mets et le vin que vous avez choisi pour l’accord? Une autre dimension sensorielle s’ouvre à vous et le vin vous emmène vers d’autres horizons… Il offre un nouveau visage, souvent bien différent de celui que la simple dégustation avait souligné.

Peut-on grignoter pendant la dégustation?

C’est une question qui fait débat mais le bon sens, une fois de plus, doit l’emporter. Il s’avère parfois nécessaire de gommer les sensations accumulées par plusieurs vins de même origine et/ou à forte personnalité. Certaines bouteilles expriment parfois tellement de défauts que ne pas se « refaire la bouche » serait priver le vin suivant de toute chance d’être apprécié à sa juste valeur… Tout dépendra aussi du nombre de vins dégustés et de leur force aromatique. Et puis, il est illusoire d’imaginer que les seuils de tolérance de chacun des participants sont identiques.

L’utilisation d’eau fraîche, non pétillante, est appropriée. Le besoin de se tonifier et neutraliser la bouche peut surgir à tout moment, surtout lorsqu’on déguste plusieurs vins rouges successifs, et à plus forte raison, s’ils proviennent du sud, donc davantage « chargés » en alcool.

On peut aussi grignoter quelques morceaux de mie de pain. Dans tous les cas, évitez autant que possible la croûte de pain ou les fruits secs, ces deux aliments étant très proches en saveurs des arômes caractéristiques de certains cépages ou même induits par des techniques particulières d’élevage du vin.

Faut-il trouver là l’explication du choix de quelques vignerons bourguignons de vous servir des amandes et des noisettes grillées pendant la dégustation? Pourrait-on imaginer que le chardonnay de certains doit être accompagné voire soutenu par quelque artifice? A chacun sa vérité…

Il existe encore plusieurs autres règles à respecter pour bénéficier pleinement de l’intérêt d’une dégustation entre amateurs passionnés. Notre prochain épisode les abordera en détail, avant d’aborder avec méthode la technique d’analyse sensorielle du vin.

Belles dégustations à tous et n’hésitez pas à alimenter cette rubrique par vos propres expériences ou témoignages!

Q.