L’autre visage du chenin, ce surdoué de la Loire

L’autre visage du chenin, ce surdoué de la Loire…

Le dossier de dégustation angevin dans lequel je suis engagé pour l’instant (et pour un certain temps encore !) me procure une irrésistible envie: celle de vous parler d’un merveilleux cépage, qui en est l’acteur principal. Mais sous un angle sans doute inhabituel.

Grappe du cépage chenin en Anjou
Grappe de chenin en Anjou

foie grasQuand on pense au chenin ligérien, aussi appelé pineau de la Loire, ce sont souvent des images de douceur, de moelleux, de vendanges tardives en automne, de foie gras ou de desserts aux agrumes qui s’imposent.

Les coteaux-du-layon, quarts-de-chaume, coteaux-de-l’aubance et autres bonnezeaux sont là pour nous rappeler que l’Anjou est une terre de grands vins liquoreux. Plus à l’Est, en Touraine, vouvray et montlouis apportent également leur lot de douces gourmandises.

Les meilleurs de ces vins, drapés dans leurs teintes dorées, associent onctuosité et vivacité. C’est un atout essentiel, qui les distingue de nombreux autres crus issus de vendanges tardives, botrytisées ou non.

Partout dans le monde, le défi posé aux vinificateurs quiVerre de coteaux-du-layon créent ces vins doux est de parvenir à leur conserver de la fraîcheur en bouche.

L’objectif n’est pas toujours atteint, loin s’en faut, et la lourdeur est bien trop souvent dominante dans de nombreuses cuvées empâtées et sirupeuses.

Le chenin lutte contre ces excès, avec un atout majeur : son inimitable vivacité naturelle…

Mais la terre angevine a plus d’un vin dans sa cuve.

 

En appellation « Anjou » (comme en Savennières mais je reviendrai sur ce fabuleux terroir dans un autre billet), elle nous offre un tout autre visage du cépage chenin, qui règne ici en maître.

Autant l’admettre, nous sommes en présence d’un surdoué, introduit en Loire depuis le 9ème siècle, qui sait presque tout faire, y compris prendre la mousse avec une relative facilité, comme dans le Saumurois ou en Touraine mais aussi en Anjou, avec de délicieuses « Fines Bulles ». Dans les millésimes froids, cette faculté de virer à l’effervescence est un cadeau pour bien des vignerons… qui ne sont alors plus contraints d’attendre d’hypothétiques surmaturités.

Les sentiers sur lesquels je vous emmène aujourd’hui sont à l’écart des classiques de la région. Ce sont ceux qu’empruntent les amateurs de grands vins blancs secs, épurés et longilignes. Certains sont des seigneurs, et les prix restés globalement très sages devraient attirer plus d’un amateur de vin franc, vif et racé. Ils restent toutefois beaucoup trop méconnus, ce qui apparaît plus que jamais injustifié.

Château de Fesles - La Chapelle 2011 - Anjou blanc sec
Un magnifique exemple…

L’anjou blanc (minimum 80% de chenin, et pour le solde, chardonnay et sauvignon) est fier de son style aérien et tonique. Il a cette attachante faculté de faire cohabiter fraîcheur et densité de fruit, tension en bouche et richesse de constitution.

Le chenin se complaît particulièrement sur les sols de la région, qualifiés de noirs (schistes) ou blancs (craie ou tuffeau). Dans certaines zones, les deux composantes sont associées. Il se dit que les meilleurs crus en proviennent et il ne faut pas chercher bien loin l’explication de l’identité minérale de ces vins. Ce caractère-là, associé aux senteurs florales, a toutefois tendance à s’estomper au fil du temps.

De nombreux arômes constituent leur palette aromatique. Vous pouvez retrouver les classiques agrumes (citron, pamplemousse) agrumes-citrons-oranges et la pomme verte ou des fruits plus enveloppés (abricot, mirabelle, reine-claude), des notes végétales parfumées (herbe fraîche, verveine) et puis du miel d’acacia ou des notes de cire de meuble. Il y en a pour tous les goûts !

Parmi les flacons présentés, j’ai dégusté quelques cuvées qui ont séjourné en fûts de chêne. Quoi qu’en pensent les esprits obtus, certains crus en bénéficient, lorsque le boisé s’intègre harmonieusement dans une matière concentrée. Mais d’autres en sont parfois victimes. En bouche, la lutte est rude face à ces décoctions de bois, dont les saveurs toastées et caramélisées nous emmènent bien trop loin de l’identité aromatique du chenin. Regrettable et inutile !

Bouteilles d'Anjou blanc secsA table, le vin sec issu de chenin se montre très polyvalent. Vous le servirez à 10-11°C et en appellation « Anjou », vous n’attendrez pas plus de 2 à 4 ans avant de l’ouvrir.

 

Parmi les alliances harmonieuses, voici mes conseils : le soufflé au fromage, les volailles à la crème ou au citron confit, les poissons nobles comme le sandre en sauce légère (beurre blanc ou émulsion) – avec le flétan c’est bon aussi ! – , les écrevisses à la crème, le saumon mariné à l’aneth et les poissons de mer grillés (bar, daurade, …). Au rayon des fromages, le chèvre (pas trop sec) est un bon choix.

Où trouver du chenin ailleurs que dans la Loire ?

Il s’est timidement implanté dans le languedoc-Roussillon où il entre dans l’assemblage de la blanquette de Limoux (avec le chardonnay et le mauzac), mais aussi en Afrique du Sud (où il est nommé « steen » et représente 1/3 des surfaces cultivées!), en Californie, Argentine, Australie et Nouvelle-Zélande.

Affiche appellation Anjou blanc
Source: Vins du Val de Loire

« Il est non loin de la mer de Bretagne, une ville située sur un rocher, riche des présents de Cérès et de Bacchus, c’est la cité d’Angers » (Sidoine Apollinaire – 5ème siècle).

Pour ceux qui en douteraient, les bienfaits de la région n’ont fait que se développer depuis.

Prenez la route de la douceur angevine, vous ne le regretterez pas. Cette terre de chenin (mais pas seulement) est une passionnante destination de découvertes œnologiques !

Q.

 

Pour en savoir plus sur les vins de Loire, c’est par ici !

 


2 réponses à “L’autre visage du chenin, ce surdoué de la Loire”

  1. Si un voyage se prépare à l’horizon…je prépare ma valise.
    Moi qui suit « minéral » je suis interpellée par le chenin…en plus avec toute la palette aromatique que tu cites…cépage qui devrait me plaire!
    Félicitation pour l’article et les photos…
    Nos soirées d’hiver sont assurées!
    Merci pour ce partage Quitou!

    Patricia

    • La Loire, terre de mon enfance (Sancerre, Pouilly-Fumé, Cosne-sur-Loire…)
      Oui, j’aimerais vous y emmener, à la rencontre du sauvignon et du chenin, deux seigneurs qui s’approprient les sols qui les accueillent…

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.